Nous publions une série de trois articles autour des produits d’épargne accessibles aux particuliers en France mais non conformes à l’éthique musulmane. Nous verrons d’abord pourquoi le livret A est notre ennemi (sic !), et avant de faire un zoom sur le nouveau livret/ fonds défense lancé par Bpifrance, nous aborderons le positionnement du fonds euros au sein du contrat d’assurance-vie.
Notre ennemi c'est le livret A !
Un titre provocateur ? Certainement. Une réalité que tout citoyen musulman soucieux de son éthique financière doit comprendre ? Absolument.
En France, plus de 80% de la population détient un livret A avec un encours national de 404 milliards d’euros. Pour beaucoup de musulmans, ce placement représente un dilemme moral profond : comment concilier la nécessité d'épargner avec les principes éthiques de l'Islam ? Chez 570easi, leader français de la finance éthique conforme aux principes islamiques, nous pensons qu'il est temps de lever le voile sur cette réalité et de proposer des alternatives concrètes.
Partie 1 : Le livret A, comprendre son fonctionnement pour mieux saisir le problème
Un produit d'épargne "miracle" en apparence
Le livret A, créé en 1818, est devenu le placement préféré des Français. Ses caractéristiques semblent effectivement séduisantes avec une souscription dès 10€ minimum :
Un taux garanti par l'État : actuellement fixé à 1,7% (2,4% en Février 2025), ce taux est révisé tous les 6 mois
Un plafond de 22 950€ pour les particuliers (76 500€ pour les assos à but non lucratif)
Une garantie totale du capital : l'État français garantit que personne ne perd
Une disponibilité immédiate : vous pouvez retirer vos fonds à tout moment
Une exonération fiscale : les intérêts sont nets d'impôts et de prélèvements sociaux
Cette apparente perfection, le combo ‘Garantie-Liquidité-Exonération’ cache pourtant une réalité plus complexe.
À quoi servent réellement vos économies ?
Contrairement à une idée reçue, votre argent placé sur le livret A ne dort pas dans un coffre-fort. Il est activement utilisé dans le système financier :
60% des fonds sont centralisés à la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) qui les utilise pour financer le logement social (< 35% des encours), prêter aux collectivités locales et investir sur les marchés financiers (des milliards d'euros placés en bourse).
40% restent dans les banques qui doivent théoriquement les utiliser pour financer les PME, les projets écologiques et l'économie sociale et solidaire (ESS).
Le mécanisme de la garantie et de rémunération
La garantie du capital et du rendement repose sur un système complexe :
L'État fixe un taux de rémunération indépendamment des performances réelles des projets en prenant compte du niveau de certains taux d’intérêts à court terme constatés sur les marchés financiers et du niveau de l’inflation sur les douze derniers mois
Si les placements de la CDC génèrent moins que promis, l'État compense. Si les placements génèrent plus, l'État prélève l'excédent
Les intérêts rapportés par les sommes présentes sur votre livret A sont calculés par quinzaine sur le mois. Les intérêts sont capitalisés, c’est-à-dire versés sur votre livret, à la fin de chaque année.
Ce système crée une déconnexion totale entre la performance réelle de vos économies et votre rémunération. En bref, vous êtes créancier de l'État, pas investisseur dans l'économie réelle.
Partie 2 : Le livret A au prisme de l'éthique musulmane
Le problème fondamental du riba
Le terme riba qui signifie littéralement "augmentation" ou "excès" s’applique sur tout échange monétaire (prêt, transfert, don…). Dans l’éthique musulmane, riba désigne tout gain obtenu sans effort, sans risque et surtout sans contrepartie réelle. Le Coran est explicite sur ce point :
"Ô les croyants ! Ne pratiquez pas l'usure en multipliant démesurément votre capital. Et craignez Allah afin que vous réussissiez !" (Sourate 3, verset 130)
Le livret A tombe directement sous cette interdiction pour plusieurs raisons :
1. Le rendement garanti = riba caractérisé
Dès le premier centime d'intérêt perçu, nous entrons dans le domaine du riba. Contrairement au système conventionnel qui distingue intérêt "raisonnable" et usure "excessive", l'Islam interdit tout surplus sur un prêt, aussi minime soit-il. Avec son taux de 1,7%, le livret A génère du riba pur et simple au même titre que tout autre contrat d’épargne, bancaire ou assurantiel.
2. La nature de créance, non d'investissement
Quand vous déposez sur un livret A, vous prêtez à l'État contre intérêt. Vous devenez créancier, pas partenaire ou investisseur. Cette relation créancier-débiteur avec intérêt fixe est précisément ce que l'Islam interdit, car elle :
Crée une injustice (le créancier gagne toujours, même si le débiteur perd)
Déconnecte la finance de l'économie réelle
Favorise la concentration des richesses du côté du pouvoir du capital
3. L'absence d’adossement à un actif réel (ou à une contrepartie réelle)
En finance islamique, toute opération financière doit être adossée à un actif existant ou à une activité économique réelle. Le Livret A, en revanche, repose sur un mécanisme où :
Aucun actif réel n’est directement associé à votre placement
Vous ne participez à aucune activité productive identifiable
Vous percevez un rendement sans engagement dans un échange économique concret
Ces asymétries sont fondamentalement contraires à l'éthique islamique qui prône la justice et l'équité dans les échanges et valorise la création de valeur réelle en toute transparence.
L'illusion de la garantie
La "sécurité" du livret A est elle-même problématique d'un point de vue islamique. Cette garantie absolue :
Encourage la passivité économique
Détourne de l'investissement productif
Crée une fausse sensation de sécurité qui éloigne de la confiance (tawakkul)
De plus, vos fonds servent indirectement à alimenter un système basé sur l'intérêt : prêts aux promoteurs indexés sur le taux du livret A, investissements sur la dette de l'État (emprunts et émissions obligataires), placements boursiers incluant des activités non licites...
La dimension spirituelle ignorée
Au-delà des aspects techniques, le livret A représente une vision du monde incompatible avec l'Islam :
L'argent qui produit de l'argent sans création de valeur réelle
L'individualisme au détriment de la solidarité communautaire
La recherche du gain sans effort contraire à l'éthique du travail en Islam
Le Prophète ﷺ nous a mis en garde en ce sens : "Il viendra un temps où il ne restera plus personne qui ne consomme pas de riba, et quiconque ne le consomme pas sera néanmoins affecté par ses résidus." (Abu Dawoud)
Partie 3 : L'alternative halal, un enjeu colossal pour le patrimoine du croyant
Pourquoi c'est un enjeu majeur au cœur de la gestion des finances personnelles
Par le biais du livret A, cette épargne par défaut détourne souvent le client de ses véritables priorités en matière de liberté financière. C’est pourtant à partir de son compte bancaire et son épargne que le musulman doit orienter ses choix :
Allouer une partie de ses ressources à des projets utiles (éducation des enfants, logement, solidarité…)
Prévoir le paiement de la zakât, pilier fondamental de la purification des biens
Anticiper le financement du Hajj, acte spirituel majeur
Laisser son épargne dormir dans un produit non aligné avec ses valeurs, sans réflexion sur son usage, revient à déléguer des choix essentiels à une logique bancaire standardisée, souvent incompatible avec une éthique islamique consciente.
La responsabilité devant Dieu
Petite anecdote révélatrice : il n’est pas rare que des clients nous confient avoir ouvert un Livret A pour chacun de leurs enfants, en précisant qu’ils veillent chaque année à redistribuer les intérêts perçus en dons caritatifs, notamment avant de s’acquitter de la zakât.
Cette pratique, bien qu’animée d’une (fausse) bonne intention, révèle une profonde méconnaissance des principes de la finance islamique. Elle traduit une banalisation préoccupante des produits bancaires rémunérés, perçus à tort comme inoffensifs, alors qu’ils reposent sur des mécanismes totalement incompatibles avec l’éthique islamique.
Ce constat met en lumière un véritable enjeu d’éducation financière et spirituelle. Il nous rappelle que nous avons collectivement la responsabilité de mieux informer, sensibiliser et accompagner les clients musulmans dans leurs choix financiers, afin qu’ils soient mieux alignés avec leurs valeurs et leurs obligations religieuses.
En effet, chaque euro placé sur un livret A est un euro qui :
Participe à un système basé sur le riba
Finance potentiellement des activités illicites
Nous rend complice d'un système injuste
Allah dit dans le Coran : "Et si vous vous repentez, vous aurez vos capitaux. Vous ne léserez point et vous ne serez point lésés." (Sourate 2, verset 279)
Les solutions halal existent et performent
Parce qu’épargner sans riba ne signifie pas renoncer à la performance, chez 570easi, nous avons développé des alternatives concrètes qui allient rendement, éthique et impact réel. Ces solutions permettent à chacun de donner du sens à son épargne, tout en construisant un patrimoine solide, utile et aligné avec ses valeurs.
1. L'investissement immobilier fractionné
L’investissement immobilier fractionné ouvre les portes de la pierre à tous, sans recours au crédit ni besoin d’un capital important. Dès 50 €, il devient possible de devenir copropriétaire d’un bien immobilier soigneusement sélectionné, de percevoir une part des loyers et de bénéficier d’une éventuelle plus-value lors de la revente.
Ce modèle repose sur un principe simple et concret : la mutualisation. En regroupant de nombreux investisseurs autour d’un même actif, chacun participe à un projet tangible — logement, commerce licite, immobilier professionnel — et perçoit une rémunération issue d’une activité réelle, et non de la spéculation.
Avec des rendements historiques de 6 à 8 % nets, ce type d’investissement redonne à la finance son sens premier : financer l’économie réelle, créer de la valeur et partager équitablement les fruits de cette valeur.
Chez 570easi, nous avons déjà lancé 8 projets Sukuk immobilierssur ce modèle — du logement résidentiel à la restauration halal — confirmant ainsi l’engouement croissant des épargnants pour une épargne éthique, transparente et accessible. Cette dynamique illustre une évolution de fond : celle d’une communauté qui reprend le contrôle de son argent et choisit de l’investir dans des projets concrets, utiles et conformes à ses principes.
C’est une manière moderne et responsable de remettre l’argent au service du bien commun, sans riba et sans opacité.
2. La SCPI éthique
Investissement dans l'immobilier de la santé et de l’éducation à partir de 1000 €
Sélection rigoureuse des actifs et des locataires (pas de secteurs illicites)
Mutualisation des risques sur un portefeuille international d’immeubles
Revenus réguliers sans liens avec les marchés boursiers
La SCPI éthique permet d’investir dans l’immobilier de manière collective et responsable, dès 1 000 €. Concrètement, elle regroupe plusieurs immeubles — hôpitaux, écoles, bureaux, logements — et redistribue aux associés les revenus générés par les loyers.
Ce placement conjugue la stabilité du marché immobilier à la simplicité d’une épargne gérée par des professionnels. Les revenus sont versés de façon régulière, sans que l’épargnant ait à se soucier de la gestion des biens, des locataires ou des aspects fiscaux.
La particularité de cette SCPI repose sur la sélection rigoureuse de ses actifs : aucun bien ni locataire issu de secteurs contraires à l’éthique islamique (alcool, jeux, finance spéculative, etc.) n’y figure. Les immeubles sont choisis pour leur utilité sociale, leur durabilité et leur impact positif sur la société.
Autre atout majeur : la souplesse d’investissement. Les versements programmés sont désormais possibles dès 50 €, et les loyers peuvent être automatiquement réinvestis, permettant ainsi de faire croître son patrimoine de manière régulière et disciplinée.
Cette approche incarne une nouvelle manière d’investir : générer des revenus réguliers tout en participant à des projets concrets et vertueux, ancrés dans l’économie réelle et pleinement alignés avec les valeurs de la finance éthique.
3. L'épargne retraite et assurance-vie
Investi sur des fonds d’investissements éthiques et responsables à partir de 500 €
Transparence sur l'allocation des fonds
Personnalisation en fonction de votre profil d’investisseur (prudent à dynamique)
Recherche d’impact selon l’approche ESG
Préparer sa retraite ou protéger sa famille ne devrait jamais se faire au détriment de ses principes. C’est tout le sens des contrats d’assurance-vie et de PERin conformes à l’éthique musulmane.
À partir de 500 €, ces solutions permettent d’investir dans des fonds composés d’entreprises et de projets respectueux des critères éthiques et environnementaux. L’allocation des fonds est transparente, et chaque épargnant peut ajuster son profil — prudent, équilibré ou dynamique — selon ses objectifs et sa situation.
Au-delà de la performance financière, ces placements offrent de véritables avantages patrimoniaux :
Une fiscalité allégée (notamment via le PERin qui permet une réduction d’impôt immédiate)
Une valorisation progressive du capital à long terme
Une transmission facilitée du patrimoine aux proches
Épargner régulièrement — même des montants modestes — devient ainsi un acte conscient, porteur de sens. L’argent n’est plus une fin en soi, mais un moyen de construire un avenir serein, utile et conforme à sa foi.
L'enjeu dépasse le simple placement individuel. En choisissant des solutions halal, vous participez à la création d'un cercle vertueux avec plus d'épargne halal = plus de poids pour construire des solutions halals et des financements éthiques disponibles
Le véritable ennemi n'est pas le livret A, c'est l'ignorance et la résignation.
Il est temps de reprendre le contrôle de votre épargne. Il est temps de transformer votre argent en outil de construction d'un avenir conforme à vos valeurs et sortir du piège spirituel et financier. L'alternative n'est pas de renoncer à épargner, mais de le faire différemment.